Pollution du Dadou par la société Tarn Enrobés : la décision du tribunal judiciaire de Castres

Pollution du Dadou par la société Tarn Enrobés : la décision du tribunal judiciaire de Castres

Communiqué - 26 septembre 2024

Après avoir pollué la rivière Dadou pendant des années en toute connaissance de cause, la société Tarn Enrobés (Eiffage, Eurovia et Spie Batignolles) qui exploite la centrale d’enrobés de Lafenasse (Terre de Bancalié), vient d’être condamnée par le tribunal judiciaire de Castres, ce 10 septembre.

La société Tarn Enrobés devra verser à l’Union de Protection de la Nature et de l’Environnement du Tarn (UPNET, FNE 81) 3000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi en tant qu’association de défense de l’environnement, ainsi que 800 euros pour compenser les frais de justice engagés par l’association.

Dans sa décision, le tribunal reconnaît le bien-fondé de l’assignation en justice déposée par l’UPNET sur la base de la violation par la société Tarn Enrobés, pendant trois années, des dispositions de l’arrêté préfectoral d’autorisation de sa centrale. Le tribunal rejette l’ensemble des objections et demandes émises par la société Tarn Enrobés en réponse à l’assignation en justice.

Depuis plusieurs années, la société Tarn Enrobés s’est attiré l’hostilité de la population en raison de sa surdité aux alertes des riverains de la centrale qui signalaient des incidents de pollution à répétition, certains d’une durée de plusieurs semaines (odeurs nauséabondes, fumées invasives, dépôts noirâtres sur les extérieurs des maisons et les véhicules). En juillet dernier, le conseil municipal de Montredon-Labessonnié s’est solennellement prononcé, à une très large majorité, contre un projet qui permettrait l’implantation d’une nouvelle centrale d’enrobés à quelques centaines de mètres de l’actuelle. Aujourd’hui, la justice adresse un signal fort en montrant que les pratiques de ce groupe industriel ne sont pas tolérables en République et notamment sur notre territoire. Il faudra à la société Tarn Enrobés tirer la conséquence évidente de tous ces événements.

Nous remercions tous ceux et toutes celles qui soutiennent la mobilisation depuis 2022. Nous saluons l’implication de l’Union de Protection de la Nature et de l’Environnement du Tarn dans ce dossier et le travail remarquable accompli par Maître Alexandre Faro, avocat en droit de l’environnement qui représente l’UPNET.

Le collectif Stop Enrobé 81

10/10/2024 : La société Tarn Enrobés disposait d’un mois pour faire appel de la décision. Elle vient d’annoncer qu’elle ne ferait pas appel. Par une lettre d’acquiescement au jugement, elle déclare « accepter purement et simplement tous les termes de ce jugement » et « renoncer à toute voie de recours contre cette décision ».

Pour en savoir plus

 En février 2023, une inspection de la centrale d’enrobés de Lafenasse par la DREAL (Direction Régionale pour l’Environnement, l’Aménagement et le Logement) mettait en évidence que la société Tarn Enrobés, consortium associant Eiffage, Eurovia et Spie Batignolles, rejetait dans le Dadou des matières polluantes pour l’environnement, et ce de manière massive (plus du double du seuil autorisé). La pollution durait depuis au moins trois années. L’exploitant avait connaissance de cette pollution, puisqu’il disposait d’analyses annuelles des rejets dans le Dadou. C’est en réclamant ces analyses pour les années 2021 et 2022 que l’inspectrice de la DREAL constatait l’infraction.

À la suite de la découverte de cette pollution, l’Union de Protection de la Nature et de l’Environnement du Tarn (UPNET, affiliée à France Nature Environnement) assignait en justice la société Tarn Enrobés au titre du préjudice moral subi en tant qu’association de défense de l’environnement.

Malgré l’évidence, la société Tarn Enrobés a toujours refusé de reconnaître sa responsabilité. Dans les conclusions rendues en réponse à cette assignation en justice, les avocats de la société Tarn Enrobés plaidaient une méprise dans la lecture des analyses des eaux rejetées dans le Dadou. « À la lecture de la valeur issue de l’analyse », écrivaient-ils, « une erreur d’interprétation a été commise par Tarn Enrobés ».

Toute « erreur d’interprétation » était cependant impossible. En effet, chaque valeur mesurée dans les eaux rejetées est donnée en valeur absolue (par exemple, 83 mg/litre de matières en suspension mesuré pour 2022) et est à comparer avec un seuil réglementaire également donné en valeur absolue (35 mg/litre maximum de matières en suspension).

Le tribunal judiciaire de Castres a rendu sa décision ce 10 septembre 2024.

Dans cette décision, le tribunal rejette, pour commencer, toutes les objections d’irrecevabilité de l’assignation en justice soulevées par les avocats de la société Tarn Enrobés.

Le tribunal reconnaît ensuite les fautes commises par la société Tarn Enrobés : la violation, pendant trois années (de 2021 à 2023), des dispositions de l’arrêté préfectoral d’autorisation de la centrale d’enrobés (en date de 1997) et le non respect d’un arrêté de mise en demeure pris par le préfet. Ces violations constituent, déclare le tribunal, une contravention au Code de l’environnement et un délit (poursuite de l’activité sans respecter un arrêté de mise en demeure).

Le tribunal souligne en outre que la société Tarn Enrobés, parfaitement informée de sa situation infractionnelle à la suite de l’inspection de la DREAL (février 2023), a malgré tout poursuivi son activité sans mesure corrective efficace avant septembre 2023.

Le tribunal confirme enfin que l’Union de Protection de la Nature et de l’Environnement du Tarn a bien subi, du fait de ces violations, un préjudice résultant de l’atteinte aux intérêts collectifs qu’elle défend.

En conséquence de quoi le tribunal condamne la société Tarn Enrobés à verser à l’Union de Protection de la Nature et de l’Environnement du Tarn 3000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 800 euros pour compenser les frais de justice engagés par l’association.

La société Tarn Enrobés dispose d’un mois pour faire appel de la décision du tribunal.